Epargne salariale

Lundi 13 mai, durant l’émission « Les Défis de la France » où le Président de la République a été longuement interrogé, la question du financement de la protection sociale a été abordée.

Emmanuel Macron souhaite que le gouvernement ouvre une « conférence sociale » sur le sujet dans les prochaines semaines, « avec l’ensemble des forces syndicales et patronales ». Lui trouve que le financement de notre modèle social « repose beaucoup trop sur le travail ».

De quoi relancer, sans le dire, l’épineuse idée de la TVA sociale. On vous explique tout ce que vous devez savoir sur cette taxe à la consommation.

 

Financement de la Sécu : « Il faut chercher de l’argent en dehors du seul travail »

Reprenons le fil. Lors de sa discussion avec la secrétaire générale de la CGT Sophie Binet, Emmanuel Macron a annoncé vouloir organiser une conférence sociale sur le mode de financement de notre modèle social.

Notre modèle constitue « un trésor de la République » mais « son financement repose beaucoup trop sur le travail », a-t-il poursuivi. Avant d’expliquer qu’il « faut aller chercher de l’argent en dehors du travail. Il y a la consommation, il y a d’autres choses ».

Sophie Binet lance alors, laconique, « la TVA sociale ». Elle fait ici référence à une idée très en vogue dans les années 2005 à 2007, qui consiste à baisser les cotisations sociales en contrepartie d’une augmentation de la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA), dont le produit serait affecté au financement de la Sécurité sociale.

Macron dément : « Non, il peut y avoir d’autres choses ! ». Ici, la prudence est de mise, le sujet étant épineux. Mais il n’en fallait pas plus pour réanimer les controverses sur le sujet.

 

Le financement de la protection sociale repose-t-il beaucoup sur le travail, comme l’assène Emmanuel Macron ?

Le financement de la protection sociale repose-t-il beaucoup sur le travail ? Le dernier rapport de la Cour des comptes sur la situation financière de la Sécurité sociale, publié en octobre 2024, nous donne des éléments de réponse.

En 2023, les régimes obligatoires de base de la Sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse ont enregistré 600 milliards d’euros de recettes :

  • Les cotisations sociales représentent quasiment la moitié des recettes, avec 291 milliards d’euros ;
  • La contribution sociale généralisée (CSG), prélevée sur les revenus d’activité (mais aussi les revenus de remplacement comme les pensions de retraite) constitue la seconde source de financement, avec 120,7 milliards d’euros.
  • La TVA arrive d’ores et déjà en troisième place, en apportant 48,4 milliards d’euros de recettes à la Sécurité sociale. En effet, en 2023, 28,57 % des recettes de la TVA étaient attribuées au financement de la Sécurité sociale (principalement à l’assurance maladie) afin de compenser les allègements de cotisations sociales.
  • Ensuite, viennent pêle-mêle la taxe sur les salaires, le forfait social ainsi que la taxe sur le tabac et les boissons.

En clair, 291 milliards d’euros (soit 48,50 % du financement de la Sécurité sociale) reposent stricto sensu sur le travail. Si on prend en compte le total de la CSG – contribution assise sur tous les revenus, même ceux non issus du travail – ce pourcentage grimpe à 68,6 %.

infographie recette financement sécurité sociale

 

 

TVA sociale : des avis divergents

Sur la question de la TVA sociale, les avis divergent :

  • La gauche et certains syndicats (notamment la CGT) y voient un impôt inéquitable, car l’accroissement de la TVA pourrait se répercuter sur les prix payés par les consommateurs, et donc grever le pouvoir d’achat des Français sans distinction de revenu ;
  • Ceux qui défendent la TVA sociale (notamment l’U2P, ou l’Union centriste) y voient au contraire l’occasion de diminuer les prélèvements sur les salaires, ce qui pourrait entraîner l’augmentation des salaires et le processus de création d’emplois. Fin 2024, l’Union centriste avait par exemple proposé le relèvement d’un ou deux points de la TVA (aujourd’hui fixée à 20 % hors produits de première nécessité) afin de le flécher vers la Sécu.

En tout état de cause, la main sera donnée aux partenaires sociaux sur cette question. Pour nourrir leur réflexion sur les pistes de financement de la Sécurité sociale, ces derniers pourront s’appuyer sur les travaux réalisés par le HCAAM, le HCFEA et le HCFiPS à la demande de François Bayrou.

Ces trois hautes instances avaient pour mission d’établir un « diagnostic partagé des causes des déséquilibres financiers » de la Sécu et « d’identifier les leviers possibles de rétablissement des comptes sociaux » à court et moyen terme.

Affaire à suivre.

Previssima – A. MARTINEN